Les cycles d'épanouissement et de mort chez les humains et les plantes éveillent en nous une pensée vivante, grâce à laquelle nous pouvons comprendre notre potentiel et celui de la Terre.1

Que pensons-nous de la fin de l’œuvre à laquelle nous avons consacré notre vie ? Lorsque cette œuvre de longue haleine est achevée, nous rendons notre dernier souffle et nous mourons. C'est un accomplissement. Notre ligne temporelle prend fin. Dans notre culture, ce moment est souvent entouré de tristesse : le regard se porte sur le corps mort. Ce corps usé s'est détérioré au fil des années – la vieillesse a son prix – mais vers la fin, une sagesse peut se développer chez la personne qui vit et travaille encore dans ce corps : son monde spirituel continue de croître alors que son existence physique décline. Cette sagesse dépasse souvent l’entendement. La personne peut se contenter de quelques mots, d'un petit geste, d'un regard compréhensif ou réconfortant. Même lorsque les capacités mentales ont diminué, cette sagesse peut transparaître, lors de brefs instants, de manière inattendue. Nous réalisons alors que oui, il y a bien un moi dans ou derrière l'apparence matérielle extérieure.

Concernant notre expérience de la mort et du trépas, il importe de savoir si nous ne voyons et ne pensons qu'à la réalité physique ou si nous faisons l'expérience qu'un être humain est davantage que matière. Dans cet article, je cherche des mots pour mettre ce supplément au centre, pour lui donner une place familière dans ma vision du monde. J'espère que, de cette façon, il permettra de plus en plus le dialogue.

Lors des cérémonies d'adieu dans les crématoriums, les cimetières ou d'autres lieux, on évoque souvent le défunt et la façon dont il a été vécu par les autres personnes qu'il côtoyait : « Telle ou telle personne fut vraiment extraordinaire... ». Tous les participants bénéficient d'un aperçu beaucoup plus complet de ce que la personne a réalisé au cours de sa vie. Chaque individu a accompli ses propres actes, singuliers, admirables. Chacun a fait ce qui lui était possible de faire et a exprimé dans le monde ce qu'il portait en lui, même si demeure parfois l'impression qu'il portait davantage que ce qu'il a pu exprimer dans cette vie. Était-ce dû aux limites imposées par les circonstances extérieures de sa vie ? Ou aux limites de sa force intérieure ?

Peut-être devrions-nous transformer les cérémonies funéraires en grandes fêtes et célébrer ce que la personne décédée a représenté pour nous, ce qu'elle a apporté à la Terre et à ses habitants à travers ses multiples activités terrestres. Faire la fête ! Avec des fleurs et des danses, des poèmes, de la musique et des récits captivants, nous pourrions organiser une célébration à la hauteur de la personne, à la hauteur de notre gratitude pour ce que ce défunt bien particulier nous a laissé : des expériences et des exemples de la concrétisation de son intériorité, de ses idées et intentions, donc de son esprit, dans la substance terrestre des années passées.

Nous pouvons nous demander comment une personne décédée, qui vient de passer du monde matériel au monde spirituel, vit notre tristesse, cette tristesse qu'elle a causée sans en être coupable, parce qu'elle a mis ou a dû mettre un terme définitif à son œuvre de vie. Bien sûr, cela nous attriste ! Les défunts nous manquent. Mais ne s'agit-il pas avant tout de notre sentiment personnel ? L'égoïsme joue-t-il un rôle dans ce deuil ? Les défunts nous manquent-ils d'autant plus que nous étions étroitement liés à eux ? Quel est le degré de pureté de ce lien qui nous unissait ? Dans quelle mesure est-il bon pour nous ? Quel est le rapport entre l'amour et l'attachement ?

Nénuphar Rosa Hardy (Nymphéa 'Hollandia'). Métamorphose des pétales en étamines. Photo : Gerda Peters

Nous pourrions aussi être très heureux de sa mort en laissant s'épanouir, dans notre esprit, l'image de tout ce que la personne a fait, de toutes ses œuvres. À travers quels nœuds principaux ou secondaires se sont-elles progressivement épanouies ? Quelles lignes principales et secondaires apparaissent dans ce parcours, avec, à chaque extrémité, les fleurs qui leur correspondent ? Avec la mort, toutes ces lignes temporelles prennent fin. L'âme concernée « sort du temps » et fleurit devant notre œil intérieur. Son regard sur sa vie est désormais intemporel et nous pouvons voir l'ensemble, sous nos yeux, comme un panorama, de la même façon qu’elle peut le faire.

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